Triangle Borea : Triangle met de l’eau dans son vin et nous… on aime ça !

Mettre de l’eau dans son vin, pas très excitant à priori… Criminel même, diraient certains amateurs. Tout juste bon pour un rosé glaçons apprécié pour toute sorte de raisons, mais pas pour son goût envoûtant. Désolé pour cette introduction, mais il fait magnifique en ce samedi de début mars, et enfermés que nous sommes comme chaque samedi, il nous prend des envies de terrasses, de paysages marins et de farniente apéritif ! Mettre de l’eau dans son vin, c’est surtout devenu une expression qui évoque la notion de compromis. Pour nous, acheteurs de matériel audio, il s’agit de l’inévitable équilibre à trouver au moment de choisir son matériel. Mais ce compromis concerne également les fabricants. Ils y sont soumis en première ligne, principalement pour des questions budgétaires. Il y a le son rêvé, défini par les références sans limite de prix, et puis il y a sa déclinaison pour en rendre une très belle fraction accessible au plus grand nombre. Sauf à viser l’absolue exclusivité sur le marché du très grand luxe (qui, vous l’avez deviné, ne nous a jamais intéressé), tous les fabricants souhaitent s’adresser au plus grand nombre et doivent donc rivaliser d’astuces pour décliner leurs trouvailles à moindre coût. Comment le réaliser sans y perdre son âme, son style acoustique et même visuel, c’est le défi auquel Triangle, comme ses confrères, est confronté.

 

Cette série Borea se doit donc d’être abordable, mais aussi désirable et surtout, une vraie Triangle. L’occasion de vous expliquer ce que, très subjectivement, cette marque représente pour nous : une Triangle est une enceinte assez classique par l’apparence. Cela a toujours été le cas chez ce constructeur qui ne cherche pas à surprendre dans ce domaine. Généralement bien proportionnée, pas spécialement petite dans sa catégorie, l’enceinte Triangle n’a jamais cherché à se distinguer par l’originalité de sa forme mais plutôt par son approche musicale généreuse, extravertie, dynamique et accrocheuse. Cette personnalité, loin d’une neutralité à la suisse, lui procure un caractère typé, assez différent de l’esprit du monitoring ou de la rigueur stricte recherchées par certains concurrents.
Cela commence toujours par le medium, reproduit par un composant en papier immaculé et au toucher lisse (ce n’est pas une raison pour y laisser traîner vos doigts !) et à la grande sensibilité. Super ouvert, super rapide, c’est le cœur du son Triangle. La version qui est utilisée sur les Borea est extrêmement proche des versions utilisées dans les séries plus haut de gamme de la marque champenoise. C’est sans doute une des clés du succès de cette série, car c’est lui qui leur donne leur âme. Triangle a toujours pensé ses enceintes comme si elles étaient des larges bandes, c’est à dire des enceintes à une seule voie. En réalité, il y en a deux ou trois, mais ce que je veux dire par là, c’est que pour respecter la signature de leur medium, les ingénieurs ont toujours pensé que les autres composants devaient se faire discrets, comme s’ils n’étaient que les prolongements des qualités intrinsèques de la voix de ce composant magique. Cela signifie que les tweeters et les woofers se doivent d’être aussi vifs et spontanés que cette voie (voix) de référence. C’est loin d’être simple et de cela découlent des choix techniques privilégiant ces priorités.

 

Par exemple, le grave ne sera jamais ultra impactant, car cela signifierait qu’il serait un peu plus lent, un peu trop lourd pour suivre la partition. De même, l’aigu ne sera jamais hyper contrôlé ou ultra linéarisé, car cela lui ferait perdre du rendement, et l’ensemble des autres composants devraient être filtrés de manière plus intrusive, ce qui « ralentirait » le son en bridant sa spontanéité. Pour entourer sa voie symbole à la blanche finition, Triangle a opté pour des HP de basse en fibre de verre tressée très légers et puissamment motorisés (pour les 3 voies, de manière à attaquer et arrêter les basses fréquences aussi vite que possible) et pour un HP d’aigu à dôme souple en tissu barré partiellement de fines pièces de phase qui linéarisent la diffusion hors axe et favorisent donc cette qualité de dispersion évidente à l’écoute. Ce tweeter plus abordable que le tweeter en titane cher à la marque depuis très longtemps est certes moins performant dans l’absolu, mais il participe de manière déterminante à l’impression de souplesse, de vitesse et même de douceur… (?!) oui, oui vous avez bien lu, vous qui connaissez peut-être Triangle de longue date.
La caisse, pardon, l’ébénisterie, c’est plus classe, est de son côté très classique, comme évoqué plus haut. Pour notre part, nous apprécions car nous savons que cette simplicité est généralement gage de longévité esthétique et de facilité d’intégration dans différents décors. Les vinyles imitant un placage bois sont assez bien réalisés et surtout choisis dans des teintes couvrant toutes les tendances. Mais ne pensez pas qu’il n’y a aucune recherche derrière ces formes simples. Les haut-parleurs sont solidement soutenu par des contreforts de MDF qui prennent appui sur les 3 parois latérales et arrière pour rigidifier considérablement l’ensemble et minimiser les colorations. Sur les 3 voies, une plinthe assied la colonne sur une embase plus large, lui procurant une meilleure stabilité, bénéfique tant à la sécurité qu’à la performance. Pas de révolution donc, mais du travail bien fait et des compromis comme promis qui n’entravent pas le plaisir d’écoute.

 

Plaisir, c’est vraiment le mot, c’est presque un leitmotiv chez Triangle : cette série Borea est fun, super fun avant tout. Que vous écoutiez un morceau de musique baroque façon Vivaldi, du funk endiablé à la Earth Wind & Fire ou du rock, voire du rock dur, le son remplit l’espace de vibrations jouissives et remarquablement vivantes. Ce qui ne signifie en aucun cas que les passages plus lents ou plus romantiques ne sont pas parfaitement servis par ces enceintes. Au contraire, leur jeu extraverti et tonique ne laisse rien dans l’ombre et fait vraiment vivre les pianissimi ou les murmures même à faible volume. Ce qui nous amène à une autre qualité liée aux choix techniques des développeurs de Triangle : une très grande facilité d’alimentation, donc un choix d’amplification très large, y compris dans des puissances modestes, ce qui est généralement positif pour le budget à y consacrer. Bien sûr, vous entendrez qu’un ampli est plus costaud ou plus raffiné qu’un autre, mais la palette de choix possible est très étendue et vous permettra de tirer aisément parti de l’excellent travail réalisé sur cette série Borea. Mention spéciale pour la plus grosse des deux voies, la BR03, qui pour 449 euros la paire est assez prodigieuse. Les deux grandes colonnes BR08 et BR09 sont capables de sonoriser de plus grands espaces en apportant encore plus de lumière dans le medium, mais sans se départir de ce caractère joueur et festif assumé qui ne nous laisse pas insensibles, nous l’avouons bien volontiers.
Ces champenoises ont un sacré peps ! Qui l’eut (Grand) cru…